Dans le secteur des particuliers employeurs et de l’emploi à domicile, près de 1,2 million de salariés accompagnent chaque jour enfants, familles et personnes fragiles. 86 % de ces professionnels sont des femmes, et la proportion atteint 99 % chez les assistants maternels. Les stéréotypes restent tenaces sur ces métiers et sont autant de freins à une meilleure intégration des hommes. Pourquoi sont-ils encore si peu nombreux à franchir le pas ? Comment bousculer les a priori ? L’étude « Genre et professionnels du domicile » dresse le constat et les leviers à activer.
Métiers du domicile : les représentations encore très fortes
Selon l’Observatoire des inégalités, 68 % des femmes font la cuisine et le ménage chaque jour (contre 43 % des hommes) et 31 % (1) d’entre elles s’occupent quotidiennement d’un proche ou d’un enfant (contre 23 % des hommes). Ces chiffres reflètent la persistance d’une forte féminisation des tâches du quotidien, qui se retrouve dans des stéréotypes sur les métiers du domicile.« Vous n’avez pas la fibre maternelle », s’est entendu dire Steven, 22 ans, avant de renoncer à devenir assistant maternel. Quant à Pierrick, 48 ans, il se souvient de certaines remarques : « J’ai rencontré des formatrices qui m’ont dit qu’elles ne me confieraient pas leurs enfants ». Ces deux témoignages sont issus de l’étude « Genre et professionnels du domicile » et montrent la difficulté pour les hommes de trouver leur place dans le secteur. Une étude réalisée sur 4 métiers (assistant maternel, garde d’enfants, assistant de vie, employé familial), en 2024, dans le cadre du Comité technique d’observation des métiers et des qualifications de la CPNEFP (Commission paritaire nationale de l'emploi et de la formation professionnelle) de la branche du secteur des particuliers employeurs et de l’emploi à domicile. Les travaux mettent en lumière comment la suspicion, les stéréotypes, le regard des autres, pèsent sur l’employabilité des hommes et l’attractivité du secteur.
En emploi, les compétences parlent d’elles-mêmes
Aujourd’hui, dans ce contexte, le choix de ces métiers par les hommes se fait donc le plus souvent à rebours des représentations collectives. Pourtant, le sentiment d’exclusion décroît lors de l’exercice du métier, et le regard sur les professionnels masculins évolue dès lors qu’ils sont sur le terrain : « Si le fait d’être un homme a pu rendre les débuts un peu difficiles, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ma réputation est faite », confie ainsi Louis, 50 ans, assistant maternel.Dans l’emploi à domicile, le bouche-à-oreille joue un rôle clé : la qualité du travail, le lien de confiance et la compétence finissent par l’emporter sur les préjugés. Cela peut être au bénéfice des hommes tout autant que des femmes. Les savoir-faire et savoir-être – écoute, bienveillance, adaptabilité, professionnalisme – peuvent exister, quel que soit le genre du salarié. Et la formation et la professionnalisation permettent de les développer, les reconnaître et de les valoriser, chez les hommes comme chez les femmes.
Des parcours multiples, souvent marqués par la reconversion
Autre enseignement : les hommes qui exercent ces métiers viennent souvent d’autres horizons. Beaucoup entament une deuxième partie de carrière, à la recherche de sens et d’utilité sociale, ou portés par les aléas de la vie. Alberto, devenu assistant de vie sur le tard, raconte : « Lorsque mon père a eu des problèmes de santé et que ma mère est devenue trop âgée, j’ai proposé de les accueillir chez moi. Pour les accompagner, je me suis formé au métier d’assistant de vie ».Le choix de s’orienter vers l’emploi à domicile est aussi motivé par la liberté qu’offre la relation particulier employeur-salarié : être maître de son organisation, adapter sa pratique à sa conception éthique.
Plus rares sont ceux qui choisissent une orientation dans le secteur dans la continuité de leur parcours, motivés par une appétence de longue date pour les métiers du soin.
Mais tous partagent une même conviction : aider les autres est un vrai métier, qui mérite reconnaissance et respect, au même titre que les femmes salariées. Trouver un sens à ses missions n’est pas une question de genre.
Attirer et fidéliser les hommes : miser sur les compétences
La société évolue, le secteur du domicile aussi, et c’est une bonne nouvelle ! En mettant les compétences au cœur des parcours, il peut attirer de nouveaux profils, plus variés, plus mixtes. L’enjeu n’est pas de féminiser ou masculiniser les métiers, mais de reconnaître la valeur professionnelle de celles et ceux qui les exercent, chaque jour, auprès des particuliers employeurs.Pour favoriser une reconnaissance professionnelle au-delà du genre, quelques leviers concrets peuvent être activés :
- Faire entendre la parole des professionnels masculins déjà en poste ;
- Développer des partenariats avec les prescripteurs de l’emploi ;
- Sensibiliser les organismes de formation et les employeurs à la mixité ;
- Valoriser la professionnalisation qui seule, peut attester des savoir-faire et savoir-être, des aptitudes professionnelles et relationnelles.
(1) : Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), Observatoire des inégalités, 2022